lundi 28 juillet 2014

Moi mes souliers

Vous me pardonnerez l’emprunt à mon homonyme Félix mais l’occasion fait le larron pour cet ultime bilan de voyage de 30 jours.

Moi mes souliers ont beaucoup voyagé,
ils m’ont porté de l’école Mont-Saint-Louis aux champs ayant connu la guerre,
J’ai traversé sur mes souliers ferrés
le monde et ses merveilles

Moi mes souliers ont marché sur le siège de la civilisation occidentale en Italie et en Sicile m’offrant ses plus beaux héritages de créativité et de génie.

Moi mes souliers ont foulé le sol des deux pays ayant colonisé le Canada, la France et l’Angleterre, renforçant plus que jamais ce désir d’indépendance nationale que j’ai si fortement senti chez les courageux Irlandais.

Moi mes souliers ont fait vœux d’éternité à la Fontaine de Trévi, partagé la même tribune que les puissants empereurs romains assistant aux féroces affrontements de gladiateurs au Colisée de Rome et même été témoin de la force créatrice du volcan Etna en palpant le flanc d’un de ses cratères.

Moi mes souliers ont visité l’opulente terre sainte du Vatican et contemplé la création d’Adam d’un air incrédule devant tant de beauté.

Moi mes souliers ont accueilli des orteils mouillés après s’être trempés dans les mers Méditerranée, Thyrénienne, Ionienne, d’Irlande ainsi que dans l’Océan Atlantique frigorifique.

Moi mes souliers ont été touché par la formidable générosité du peuple irlandais, de son accueil, de ses recommandations et de sa mansuétude.

Moi mes souliers ont partagé les plus belles routes du monde avec la verte campagne, les champs à perte de vue, la dense forêt, les montagnes, les rochers, les lacs et les rivières, les troupeaux broutant en bordure et même souvent, directement sur le chemin.

Moi mes souliers ont appuyé sur l’accélérateur à droite sur des routes… à gauche.

Moi mes souliers ont grimpé des escaliers de pierre au Skelligs Micheals, des escarpements rocheux de la Diamond Hill et des monuments funéraires du Néolithique.

Moi mes souliers ont accompagné mon palais dans un royaume de saveurs et de goûts, une gastronomie riche et variée, des bières à émoustiller les papilles et des plats réconfortants.

Moi mes souliers se sont retrouvés sous 21 lits différents, de l’Italie continentale à la Sicile, des quatre coins de l’Irlande en transitant par le Vatican, Londres, l’Irlande du Nord et Paris, tapissant ainsi mon passeport et mon imaginaire de souvenirs éternels.

Moi mes souliers ont assisté à des moments uniques tel un arc-en-ciel saluant un matin irlandais brumeux, un berger rapatriant son troupeau dans une vaste vallée ou une cérémonie commémorative devant un château médiéval.

Sur mes souliers y a de l’eau des rochers
D’la boue des champs et des pleurs de joie de la plus merveilleuse femme du monde qui a accepté de devenir la mienne.

Moi mes souliers ont guidé mes doigts sur le clavier, parfois sur des routes virtuelles approximativement fonctionnelles, pour vous écrire chaque soir. Ce fut un honneur de vous savoir là, à l’écoute par vos lectures et vos commentaires. Merci d’avoir voyagé avec mes semelles usées et je terminerai en empruntant les mots du grand poète de l’île d’Orléans :

Au paradis, paraît-il mes amis
C’est pas la place des souliers vernis
Dépêchez-vous de salir vos souliers
Si vous voulez être pardonnés…

samedi 26 juillet 2014

Se rapprocher du paradis

Terminer un voyage, c’est en débuter un autre. En tant que mortel terrestre, rien ne nous empêche occasionnellement de nous rapprocher du monde céleste et spirituel. Cette dernière journée en sol irlandais allait, une fois de plus, nous rapprocher des cieux.

Nous avons donc quitté Donegal de bon matin via la voie terrestre vers Dublin. Ce fut l’occasion d’ajouter un fleuron à notre palmarès de voyage : visiter un nouveau pays! En effet, la route empruntée traversait, durant une heure environ, l’Irlande du Nord, un pays limitrophe de la République d’Irlande. Située dans la partie Nord-Est de l’île, l’Irlande du Nord fait partie du Royaume-Uni (avec l’Angleterre, l’Écosse et le Pays de Galles) contrairement à la République qui a fait sécession dans une révolte ensanglantée. Muni de mon passeport, j’étais prêt à traverser la frontière… qui n’existe pas! En fait, la frontière est belle et bien là, et passe en plein milieu d’une station d’essence au prise avec un sérieux problème de taux de change compte tenu du fait que l’unité monétaire de l’Irlande du Nord n’est pas l’Euro mais bien la Livre Sterling!
La seule différence sur les routes de l’Irlande du Nord, c’est que l’unité de mesure utilisée est le mile et non le kilomètre.Rien de bien excitant sur le chemin autre que de s’intéresser aux panneaux de signalisation loufoque!
Notre visite de la journée fut probablement LA plus spectaculaire du périple : le site de Bru Na Boinne nommé ainsi en l’honneur du dieu Dagda et de son épouse Boinne (une rivière), deux figures marquantes dans la mythologie celtique. Le site est surtout connu pour abriter un complexe funéraire hors du commun.

Construit durant le Néolithique (précédent ainsi le célèbre Stonehenge en Angleterre de 1000 ans et même les fameuses pyramides de Gizeh de 600 ans), Bru Na Boinne est un vaste site regroupant 3 séries de tombeaux. Le plus vaste d’entre eux se nomme Newgrange et date de 3200 avant notre ère. Sans outil moderne, ces hommes de la préhistoire ont construit un tombeau de 80 mètres de diamètre par 13 mètre de haut et pesant plus de 200 000 tonnes!! Cette structure auto-portante, sans mortier pour faire tenir les pierres, a résisté à l’ère du temps pour n’être retrouvé qu’en 1699 par un fermier qui voulait entretenir les routes de son domaine et qui a commencé à épierrer son champs pour tomber, par hasard, sur une IMMENSE pierre sculptée. En fait, ils existent pas moins de 97 de ces mégalithiques autour du monument! Le site fut finalement exhumé dans les années 1960.
Pourquoi un site aussi grand et monumental? Il y a également un lien à faire avec le Soleil. Dans les croyances animiques de l’époque, il était fréquent que ce dernier soit associé à la divinité la plus importante constituant la seule et unique source de vie. La particularité de Bru Na Boinne, c’est que la nécropole est orientée parfaitement avec l’astre lumineux pour qu’au solstice d’hier, autours du 21 décembre, la lumière pénètre dans une cavité au-dessus de la porte principale, franchisse un tunnel de 14 mètres pour éclairer de tous ces feux la chambre funéraire pour environ 17 minutes!! Sans aucun instrument ou connaissances astronomiques certaines, ces hommes il y a 4000 ans ont réussi où des météorologues échouent chaque jour à notre époque!! Parfaitement incroyable!! De plus, la façade Est, celle qui fait face au Soleil levant, est recouverte de Quartz blanc, une pierre qui réfléchi très bien la lumière grace à ses cristaux. Ce n’est pas le cas sur les autres façades!
Comment ont-ils bien pu transporter ces blocs? Ceux-ci se trouvaient, selon les géologues, à une dizaine de kilomètre du site. Ils ont donc fort probablement utilisé le transport maritime et, de la rive, un système avec des billes de bois roulantes. Cette hypothèse est souvent utilisée pour expliquer la construction des pyramides d’Égypte.
Lorsqu’on visite l’exposition, on peut voir à quel point leurs habitations étaient rudimentaires. Selon les historiens, il leur aurait fallu environ 60 ans pour construire le complexe de Bru Na Boinne et qu’à l’époque, l’espérance de vie n’était que de 35 ans! Il aura donc fallu 3 générations de travailleurs acharnés pour construire ce tombeau qui abritait… 5 corps!! Ceci démontre l’importance que ces hommes de l’Antiquité accordaient à la vie après la mort, que la lumière représentait probablement ce passage céleste entre ce monde et l’autre.
Durant le voyage, nous avons résidé dans tous les types d’hébergements : hôtels, bed&breakfast, auberge de jeunesse, résidence universitaire et même une ferme. Pour notre dernière soirée en Irlande, celle-ci nous réservait quelque chose d’encore plus spécial : un centre de retraite religieuse pour pèlerins! Voyez-vous, quand nous avons réservé nos hôtel, le chambre la moins chère à Dublin pour ce soir était de 400 Euros! Nous avons su en arrivant ici que Garth Brooks, l’icône du country, donnait une série de 5 concerts au Phoenix Park de Dublin et pas moins de 400 000 personnes étaient attenues, soit un dixième de la population de l’Irlande! Mais les résidents qui habitent aux abords du Park ont réussi avec de multiples récriminations à faire annuler les concerts, laissant en deuil des milliers de porteurs de chapeau de cow-boys!

On croyait VRAIMENT s’être trompé d’endroit mais non! Bible sur le bureau dans la chambre, chapelle à proximité pour le recueillement, décoration très tendance, un mélange d’odeur d’enscent et de petit vieux, un véritable paradis!!
C’est avec regret que je vous annonce le décès des saucisses vainqueurs de nombreux prix achetées hier à Donegal. Elles n’ont malheureusement pas survécu à une journée dans la voiture au Soleil. Elles laissent dans le deuil un acheteur en pleurs. Prière de ne pas envoyer de fleur mais un don à l’association des charcutiers irlandais serait apprécié!!
Une des choses que j’ai remarqué depuis deux semaines : les Irlandais sont friants de paris sportifs. Dans chaque ville visitée, nous avons vu des bureaux de paris et ce, sur chaque coin de rue. Il y avait d’importantes courses à Galway ce week-end, ca a du gager fort!

Nous avons donc du nous retourner de bord et trouver une solution pour le souper. Nous sommes donc allé souper à proximité de notre retraite fermée. Après avoir prononcé la prière d’avant repas, ce fut un bonheur de goûter la Fransican ways, une bière d’abaye de Cork, très très goûteuse. Vraiment, si le paradis existe, il n’est pas loin d’ici.

vendredi 25 juillet 2014

Vertiges septentrionaux

Nous avons quitté la région du Connemara avec regret ce matin pour migrer vers la partie nordique de l’île. Quand la première chanson de la journée que tu entends est Vertigo de U2, ça part fort! Mais cette pièce prémonitoire allait prendre tout son sens plus tard…

La réputation qui précède le Connemara est totalement justifiée. En fait, c’est un savant melting pot de tout ce que l’Irlande a de plus beaux à offrir comme paysage : des montagnes, des lacs, la mer, toutes les sortes de végétations, des animaux en liberté, de spectaculaires rochers, un levé de Soleil radieux, une route quasi déserte, moment parfait. Nous avons sérieusement pensé à faire une offre d’achat sur une ferme dans le coin mais il me sera difficile d’arriver à 9h25 pour le premier cours au Mont-Saint-Louis!
Le reste du trajet fut plutôt générique en passant par Westport et Sligo pour se terminer à Donegal, dans la région la plus au Nord de l’Irlande. La ville est plutôt petite mais assez charmante. La place en forme de diamant au centre rend l’orientation plutôt difficile mais comme il n’y a que deux artères principales qui contournent le chateau, on comprend vite le concept!
Pour le dîner, notre choix s’est arrêté sur la rapidité plutôt que sur l’aspect gastronomie de la chose! Petit incursion dans la cuisine fusion avec un burritos mexicain au bœuf irlandais, fort réussi dois-je l’avouer avec surprise! Mais il n’y a aucun doute sur une chose : la vache libre en Irlande donne un goût sans égal à leur viande et leurs produits laitiers.
En nous promenant un peu, nous sommes tombés par hasard sur une charcuterie ayant remporté pas moins de 6 prix internationaux pour ses différentes variétés de saucisses. Et la plus titrée de toutes est celle à l’érable! Il n’en fallait pas plus pour que je m’en procure pour tester la qualité du produit! Rappelons le fameux Black Pudding de Glenbeigh, vainqueur de multiples récompenses internationales, j’ai hâte au souper pour flotter dans les nuages de la gastronomie cette fois-ci! Un vrai professionnel qui garde même sa coutellerie dans une installation garantissant la salubrité de ses précieuses lames!
Nous avons repris la route vers l’Ouest pour un petit tronçon où, littéralement, on avait l’impression de tomber dans l’Océan! Encore de la conduite vertigineuse entre le ciel, la mer et le plancher des vaches!
En longeant la côte maritime, nous sommes passés par Killybegs, un village de pêcheurs mais LOIN de ceux que nous avions déjà croisés. On parle ici de pêche commerciale et industrielle et non de papie avec sa canne, son ciré jaune et ses bottes d’eau!
Le moment fort de cette journée fut notre visite à Slieve League, un récif de falaises de 600 mètres de hauteur, soit trois fois le dénivelé du Cliff of Moher. Ce dernier dispose d’une plus grande notoriété vu sa position géographique plus centrale car peu de touristes se risquent à prendre le volant jusqu’au Nord. Pour éviter tout risque, nous avons pris soin de laisser la voiture dans la stationnement au bas de la montée, nous grimperons à pieds le 1,5 kilomètres jusqu’au point de vue!
Tous les Irlandais rencontrés nous confirment à quel point nous avons été privilégiés côté météo ces deux dernières semaines. 4h de l’après-midi, un mercure frôlant les 30 degrés, bonne idée de grimper! Mais ça valait TELLEMENT chaque goûte de sueur qui a perlé sur nos fronts. Une mer puissante, des rochers dégageant une image de grandeur, de force et de résistance face aux éléments de la nature, une pente à faire frémir les plus téméraires, des moutons qui broutent à flanc de collines, beau, tellement beau.
Après une telle vue et cette montée ayant une fois de plus tester ma résistance aux hauteurs, pourquoi pas une petite glace en jetant un dernier regard a cette carte postale réelle devant nos yeux en ayant une belle petite pensée pour Maude Provost, membre fondatrice des VIP!!!
En revenant vers Donegal, on nous avait recommandé fortement de rouler par la Glen besh pass, une route panoramique dans une formidable vallée. Ce passage nous a littéralement fait tourner la tête de bonheur! Des lacets de route pentues, des arbres géants, des moutons partout, une chute et une rivière, des rochers, l’impression d’être au fin fond du Grand Canyon et de pouvoir nourrir un écho éternel.
De retour en ville, j’avais une envie folle de manger les saucisses médaillées du loustic moustachu de l’après-midi! Je vous ai parlé souvent de l’accueil des Irlandais, de leur désir de nous transmettre le meilleur de leur pays. Le proprio de l’Hostel où nous logeons ce soir nous a gratuitement offert un bol du meilleur Irish stew du voyage, qu’il avait lui-même cuisiné! Un pur régal.
C’est bien installé dans la balançoire familiale que j’ai complété l’écriture de ce Blog. La bande à Bono avait bien raison ce matin : l’Irlande trouvera toujours le moyen de nous étourdir par sa beauté, son caractère, sa culture, son peuple, sa nourriture, son histoire. Je me laisse bercer au son des moutons en cette enivrante soirée…