mercredi 2 mai 2007

Les dessous du corps humain


Comment réagiriez-vous si l'on épluchait un cadavre couche par couche, à la manière d'un oignon? La scène paraît dégoûtante, mais elle a pourtant engendré des sculptures tenant à la fois de la leçon d'anatomie et de l'oeuvre d'art, qui ont fasciné plus de 20 millions de visiteurs et continuent de créer un engouement sur trois continents. L'exposition Le Monde du corps, qui arrive à Montréal, ne laisse personne indifférent

Qu'il s'agisse d'un joueur de soccer dont l'absence de peau dévoile ses muscles en pleine action, d'un penseur dévoilant son cerveau, ou d'un poumon de fumeur affreusement noirci, l'exposition Body Worlds, rebaptisée Le Monde du corps pour son passage au Centre des sciences de Montréal à compter du 10 mai jusqu'en septembre 2007.

Devant plusieurs de ces sculptures, un même constat: combien l'être humain ne tient qu'à un fil. L'étirement du pied qui frappe le ballon repose sur une poignée de tendons qui semblent si fragiles. Le labyrinthe du système nerveux est aussi mince qu'une feuille de papier. Et pourtant, ça marche!

Gunther von Hagens a mis au point la technique de plastination en 1977. En gros, il s'agit d'une procédure qui consiste à vider le corps de tous ses fluides -- l'eau, le sang et même le gras -- et à les remplacer par ce que les scientifiques appellent des plastiques réactifs comme du caoutchouc de silicium ou de l'époxyde. Ceux-ci se solidifient après avoir été injectés sous vide. C'est ce qui donne aux corps ou aux organes la solidité nécessaire pour être préservés presque indéfiniment, assure le Dr von Hagens. Mais, surtout, cela permet aux organes de conserver leur apparence réelle alors que le moyen le plus connu, jusqu'ici, était de les noyer dans le formol.

Résultat, tous ce qui est présenté dans Body Worlds est authentique: ce ne sont pas des moulages en plastique, ce sont de véritables corps humains, de véritables cerveaux, de véritables poumons.

Cette technique est gérée, depuis 1993, par l'Institut de plastination, une entreprise que M. von Hagens a fondée à Heidelberg, en Allemagne. Et c'est une business en soi: quelque 400 laboratoires et universités lui achètent désormais des cadavres ou des organes «plastinés».

Quelque 7000 personnes, dont plus de 6000 Européens, ont choisi de léguer leur corps à l'Institut. Mais pour satisfaire à la demande, l'Institut s'approvisionne aussi à l'étranger, et de là vient la controverse qui poursuit Body Worlds: von Hagens a été accusé d'avoir utilisé, pour ses expositions et pour approvisionner ses clients, des corps de patients d'hôpitaux du Kirghizistan qui n'avaient pas donné leur consentement, ainsi que des prisonniers exécutés en Chine.

Peu importe la controverse entourant cette exposition, je suis persuadé que le Centre des sciences de Montréal recevra plus de visiteurs que l’objectif de 400 000 qu’il s’est fixé ! À voir dès la semaine prochaine au Vieux-port de Montréal.

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